jeudi 6 janvier 2011

Traumatismes et urgence dentaire

Les dents sont particulièrement vulnérables lors des traumatismes de la face car elles ne bénéficient d’aucun "pare choc" naturel.
La gravité de ce traumatisme ainsi que le niveau d’urgence de sa prise en charge varie selon l’état de la dent elle-même, mais aussi selon l’état de délabrement des éléments soutien de cette dernière, à savoir l’os alvéolaire et le ligament alvéolo dentaire.
Tout traumatisme dentaire impose un diagnostic précis de la gravité de la lésion dont dépendra le traitement et le pronostic de survie de la dent à long terme.
Par ordre de fréquence sont atteintes très majoritairement les incisives et des canines (notamment supérieures) et dans une moindre mesure les molaires et prémolaires. La raison en est purement topographique, les traumatismes survenant le plus souvent de face.
Le pic de fréquence se situe entre 5 et 11 ans.
SACHEZ QUE : Tout traumatisme dentaire (de la simple contusion à l’avulsion complète), même pris en charge dans les meilleur délais, peut entraîner une mortification totale de la dent allant jusqu’à sa perte définitive
A. Les principales atteintes :
La contusion dentaire : Il s’agit du traumatisme le moins violent qui entraîne un simple ébranlement de la dent sans fracture (tant au niveau de la dent que de ses organes de soutien).
La fracture : Elle peut siéger soit au niveau de la couronne (partie visible de la dent), soit au niveau de son apex (racine) voire les deux. Il existe par ailleurs une éventuelle mise à nue de la pulpe dentaire (organe amenant la vascularisation et l’innervation de la dent) et/ou une fracture de l’os alvéolaire (os entourant et soutenant la dent).
La luxation partielle : Il s’agit d’un déplacement de la dent dans son alvéole que l’on peut faire bouger facilement. Elle n’est cependant pas sortie de sa cavité osseuse.
Cette luxation partielle peut s’accomplir dans les trois plans de l’espace c’est-à-dire en avant, en arrière, en haut (on parle alors d’ingression) ou en bas ( on parle alors d’égression).Cette luxation peut être associée à des fractures osseuses et de mises à nue de la pulpe.
La luxation complète : Stade ultime de la luxation partielle, la dent est alors totalement sortie de son alvéole et, si elle est retrouvée, doit être conservée dans des conditions précises et réimplantée selon les modalités que nous allons développer plus loin.
SACHEZ QUE : La prise en charge que nous développons ne concerne que les dents DEFINITIVES.
Les "dents de lait " font l’objet d’un traitement particulier abordé en fin de chapitre.
B. PRISE EN CHARGE des traumatismes dentaires :
Qu’il soit isolé ou dans le cadre des traumatismes faciaux, le traumatisme dentaire est responsable, pour des raisons aisément compréhensibles, d’une angoisse quant au devenir esthétique du sourire mais aussi en raison des conséquences financières d’une éventuelle future prothèse dentaire nécessaire.
- L’examen clinique :
Il est le plus souvent effectué aux services des urgences. Il est consigné par écrit, pouvant donner lieu à un certificat médical.
Le médecin recherche une fracture dentaire et/ou osseuse, une mise à nue de la pulpe (petit point rouge visible dans la dent), une mobilité dentaire, et procède à des tests de vitalité sur la dent.
L’examen est complété par un examen radiologique standard (généralement un panoramique dentaire) voire des clichés rétro alvéolaires.
Au terme de cet examen clinique et radiologique un DIAGNOSTIC est posé et la prise en charge effectuée.
LA CONTUSION :
La dent est douloureuse mais ne présente aucune fracture ni mobilité. Toutefois l’émail peut être fissuré.
Il peut exister une sidération de la sensibilité de la dent (tests de vitalité négatifs) due à un gonflement de la pulpe suite au traumatisme. La dent devient donc insensible.
Il n’existe dans ce cas précis aucune intervention chirurgicale à envisager, et seul un traitement médical et des consignes d’alimentation (alimentation molle pendant 1 mois) pourront au mieux lutter contre cette inflammation.
La récupération de cette sensibilité sera sous la dépendance de cette même pulpe à lutter contre ce phénomène, le risque ultime étant la mortification dentaire (bien que rare).
Le suivi clinique est généralement du ressort du chirurgien dentiste qui s’assurera de la récupération de la vitalité de la dent, et procédera au traitement canalaire (dévitalisation) en cas mortification pulpaire.
LES FRACTURES :
La fracture de la couronne :
2 cas peuvent se présenter :
1- Fracture sans mise à nue de la pulpe : en l’absence de mobilité, le traitement est celui de la contusion dentaire avec une surveillance identique.
La restauration prothétique est du domaine du chirurgien dentiste.
2- Fracture avec mise à nue de la pulpe : le risque immédiat est celui de la colonisation de cette dent par les germes buccaux et les conséquences décrites dans le chapitre "infection d’origine dentaire".
Le traitement comporte donc une mise sous antibiotique et le traitement du canal dentaire, le plus tôt possible, par votre chirurgien dentiste afin de protéger la pulpe de l’environnement septique de la bouche.
Le chirurgien dentiste qui effectue le traitement canalaire envisage également le remplacement prothétique de la couronne.
La fracture de la couronne et/ou de la racine :
La survie dentaire est ici plus complexe et nécessite une prise charge rapide avec la plupart du temps une contention externe (dispositif permettant de maintenir la dent et décrit dans le chapitre "luxations".
L’extraction est cependant parfois nécessaire si la capacité de cicatrisation de la dent est insuffisante ou si la hauteur de racine restante est insuffisante pour pouvoir envisager une reconstruction prothétique (couronne sur pivot).
La fracture associée de l’os alvéolaire :
Dans ce cas précis le maintien osseux de la dent est atteint. Une contention externe est alors nécessaire afin de permettre une cicatrisation de l’os en bonne position.
Les modalités de l’intervention sont décrites dans les chapitres "luxation partielle" "luxation complète".
LA LUXATION PARTIELLE :
La dent luxée partiellement apparaît en position anormale sur l’arcade dentaire avec, à son pourtour, une gencive saignante et boursouflée. Le traitement varie selon l’orientation de luxation.
Ainsi : les luxations antérieures (vers la lèvre) ou postérieures (vers le palais ou la langue) ainsi que les dents sorties de façon partielle de leur alvéole (égression) nécessitent :
Un repositionnement associé à une contention externe (cf. chapitre luxation complète) pendant une durée d’environ 6 semaines.
Une alimentation molle ou liquide pendant la durée du blocage.
Des bains de bouche réguliers effectués selon la prescription.
SACHEZ QUE : En cas de luxation dentaire en ingression, c’est-à-dire enfoncée dans son alvéole, l’abstention thérapeutique peut être une alternative au repositionnement chirurgical (la dent pouvant reprendre sa place normale au bout de quelques semaines)
Dans le cas des enfants présentant une ingression (impaction) des dents de lait,l’extraction de cette dernière peut être rendue nécessaire en raison du traumatisme qu’elle engendre sur le germe de la dent définitive sous jacente (cf. " le cas particulier de l’enfant " dans ce même chapitre)
Dans tous les cas, le suivi devra être régulier pendant les 3 premiers mois afin de déceler une éventuelle mortification de la dent et procéder au traitement de son canal.
LA LUXATION COMPLETE :
La dent qui est alors complètement sortie de son alvéole. Il s’agit, contrairement aux autres traumatismes dentaires préalablement décrits d’une URGENCE chirurgicale si l’on veut espérer conserver la dent.
En effet l’organe de maintien de la dent, le ligament alvéolo dentaire (véritable ancrage de la dent au niveau de l’os), est totalement mis à nu lors de l’expulsion et dépourvu de nutrition.
De la survie des cellules du ligament dépendra les chances de réussite de la réimplantation
En pratique que faire ?
1. Rechercher et retrouver la dent
2. Maintenir la dent dans un milieu propice à sa survie :
Il faut au mieux REIMPLANTER DIRECTEMENT la dent dans son alvéole, en la tenant par la couronne, après nettoyage à l’eau claire et sans frotter la racine.
L’acte est non douloureux et permet d’attendre l’avis du spécialiste.
Si cela est impossible (fracture de l’os associée, corps étranger dans la cavité d’avulsion..), il faudra alors conserver la dent dans un milieu propre à la survie des cellules du ligament alvéolaire. Ceci est au mieux réalisé dans du LAIT ou à défaut dans du sérum physiologique.
Ne pas mettre la dent dans de la glace
3. Consulter en urgence :
Après le conditionnement de la dent luxée, c’est le deuxième réflexe car la RAPIDITE avec laquelle la dent sera réimplantée garantira les meilleures chances de survie.
Cette réimplantation et la contention de la dent luxée (soit totalement soit partiellement) sont effectuées :
Soit sous Anesthésie Locale : elle nécessite alors l’entière coopération du patient et l’absence de traumatisme important de l’os alvéolaire.
Soit sous Anesthésie Générale : pour tous les autres cas, et de façon générale chez les enfants
Quels sont les moyens de contention ?
Au CHRU de Tours, il s’agit d’une contention réalisée par la pose d’un arc métallique maintenu aux dents saines par des ligatures au fil d’acier (cela suppose qu’il reste des dents saines !)
La ou les dents luxées sont alors remises en place puis maintenues par des fils d’acier reliés à l’arc métallique.
L’alternative à la pose de cet arc est un système de contention collé sur les dents adjacentes à la dent luxée ( comme pour les appareils orthodontiques). Son usage est, à ce jour, réservé aux enfants.
Arc et fil métallique
Dent maintenue par un système collé à gauche et par un arc métallique à droite
En pratique :
L’intervention se déroule en 30 minutes environ pour 1 dent luxée.
L’hospitalisation est réduite à 24-48 heures.
Consignes post-opératoires : bains de bouche et alimentation molle pendant 45 jours.
Le suivi clinique en consultation est effectué à J+21 et J+45 jours du traumatisme.
L’ablation des arcs est effectuée à la consultation après environ 45 jours de contention.
LE CAS PARTICULIER DE L’ENFANT
La traumatologie dentaire de l’enfant est spécifique de part la présence de la denture lactéale (dents de lait) ainsi que des germes des dents définitives qui imposent un traitement spécifique.
Schématiquement, quels sont les points essentiels qui différencient l’enfant de l’adulte dans la prise en charge ?
Une dent de lait est très rarement réimplantée. Son repositionnement expose le germe de la dent définitive sous jacente à un risque septique et ,de fait, ce risque n’est que très rarement couru en dehors de cas très spécifiques.
La perte prématurée, ou la luxation, d’une dent de lait peuvent avoir des conséquences sur l’éruption et l’intégrité de la dent définitive sous jacente. C’est pourquoi un SUIVI REGULIER par chirurgien dentiste est donc hautement recommandé afin de vérifier l’éruption à terme et la vitalité de la dent définitive.
La réimplantation, ou la contention (pour luxation partielle) d’une dent définitive devrait faire l’objet, dans la mesure du possible, d’une contention par arc collé et non par arc rigide pour des raisons de confort mais aussi d’atteinte gingivale. A ce jour, ce matériel est disponible à l’hôpital des enfants (Cloche ville).

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